Le journaliste, ancien président de l’Unjci, a animé une conference de presse ce samedi 5 mars 2022 à Abidjan.
Avant tout propos, je tiens à me présenter à ceux qui ne me connaissent pas. Je suis journaliste depuis 1998. J’ai occupé toutes les fonctions dans une rédaction, journaliste, chef de service, secrétaire général de rédaction, rédacteur en chef, directeur de la rédaction et directeur de publication. J’ai été président de l’Union nationale des journalistes de Côte d’Ivoire de 2012 à 2019. J’ai été membre du Comité directeur de la Fédération africaine des journalistes de 2016 à 2019. Je fais partie de ceux qui donnent les notes pour le classement mondial de reporter sans frontière. Je suis le Président de l’ONG Confrères Journalistes. Et pour finir, je suis Officier dans l’Ordre du mérite national et Officier dans l’ordre du mérite de la Communication.
Je donne toutes ces informations pour que mes états de services soient connus afin que nul ne se trompe sur mon compte et mon ambition pour mon pays.
Aujourd’hui, je suis devant vous en ma qualité de simple supporter des Eléphants, en tant que simple citoyen observateur du microcosme sportif ivoirien.
De quoi je me mêle ?
Moi qui ne suis membre d’aucune instance sportive, je ne suis proche d’aucun dirigeant de club. Je ne connais aucun candidat à la présidence de la FIF. Je ne connais aucun haut responsable du Conor-Fif. Je ne connais aucun joueur de l’équipe nationale de foot. Je ne connais aucun entraineur. Comme la majorité des supporters, je vais au stade régulièrement quand les équipes ivoiriennes jouent. Je les regarde à la télévision quand elles sont à l’extérieur comme lors de la dernière CAN.
Etant à équidistance de tous les acteurs du football ivoirien et n’ayant aucun intérêt avec qui que ce soit, j’ai la légitimité pour parler et exprimer mon opinion en toute liberté.
La Can 2021 vient de s’achever au Cameroun avec l’élimination de mon pays, la Côte d’Ivoire en 8ème de finale. Avant cela, nous avons été lamentablement éliminés de la prochaine Coupe du monde qui se jouera au Qatar.
Quand je jette un regard dans le rétroviseur, je me rends compte que durant ces dernières années, notre équipe nationale a vu défiler à sa tête plusieurs techniciens. Je me rends compte que nous ne nous inscrivons pas dans la durée. Nous sommes pressés et nous voulons tout de suite des résultats avec des entraineurs clé en main, capable de nous procurer ici et maintenant le graal. Quelle erreur grossière !
Quand j’observe la valse des coaches, je réalise que quelques locaux et un grand nombre d’expatriés ont conduit les Eléphants. En termes de résultats, le bilan détaillé donne ceci.
Depuis la mise sur pied de l’équipe nationale de football en 1960, elle a connu 36 sélectionneurs. Ce sont 21 techniciens expatriés dont 2 sont revenus à 2 reprises. 12 sont issus de la France, 3 de l’Allemagne, 2 du Brésil, 1 de la Pologne, 1 de la Bosnie-Herzégovine, 1 de la Suède, 1 de la Belgique.
10 sont issus de la Côte d’Ivoire. Sur les 10 Ivoiriens, Yéo Martial a remporté la CAN en 1992 ; Kamara Ibrahim a remporté la CAN des cadets en 2013 ; Kouadio Georges a remporté le trophée de l’UEMOA en 2008 ; Mama Ouattara, vice-champion CAN Junior en 2003.
Alain Gouaméné a remporté le Tournoi de Toulon en 2010 avec l’équipe nationale espoir
Je réalise que les techniciens expatriés, mieux payés que nos ministres et présidents d’institution, avec une enveloppe de 30 à 45 millions de francs par mois n’ont pas des résultats toujours à la hauteur des sacrifices financiers consentis par l’Etat.
Sur les 21 expatriés. Hervé Renard a remporté une Can. Henri Michel a qualifié le pays pour la Coupe du monde 2006, en 2010 c’était Vahid et en 2014 Lamouchi. Et tous ont été incapables de franchir le premier tour. Rien que de la figuration.
En conséquence de ce qui précède, je pense qu’il est temps, grand temps de penser autrement notre sport roi.
Nous devons :
-Faire des projets viables qui s’inscrivent dans la durée.
-Faire confiance à ceux des nôtres qui ont déjà la technicité.
-Former des techniciens locaux
Nous devons nous inspirer de l’exemple sénégalais avec Aliou Cissé qui, après sept années de durs labeurs, a offert le premier titre continental aux Lions de la Teranga.
Au moment où s’achève le mandat du technicien Patrice Beaumelle à la tête des Eléphants, je pense qu’il est temps d’oser courageusement un technicien local et de monter un projet sur le long et moyen terme. Cela dit, la Côte d’Ivoire a des hommes et des talents à même de conduire les Eléphants.
Je pense particulièrement et spécialement à Kolo Touré Habib qui a été coach adjoint des Eléphants, qui est actuellement le coach adjoint d’un grand club du championnat d’Angleterre, qui a été capitaine des Eléphants, qui a remporté la coupe d’Afrique et qui a joué sur tous les grands stades du monde.
Je pense à Kamara Ibrahim, qui a amené la Côte d’ivoire en ¼ quart de finale de la Can et qui a remporté une coupe en catégorie cadet.
Je pense à Zahui François qui a envoyé la Côte d’Ivoire en finale d’une Can sans encaisser le moindre but.
Au-delà de ceux-là, on peut envoyer des anciens footballeurs en formation.
Laissons donc de côté nos petites querelles inhérentes à toute vie en communauté et pensons d’abord et avant tout à la Nation. Ouvrons grands les yeux.
Autant aucun pays occidental n’a encore pris un technicien africain pour coacher son équipe nationale, je souhaite qu’on mette fin au « mercenariat » à la tête de nos équipes nationales.
Je souhaite plein succès à tous les candidats à la présidence de la FIF. Que le meilleur l’emporte. Mais que le vainqueur sache que les Ivoiriens dans leur écrasante majorité sont fatigués de voir des expatriés échouer à la tête de notre équipe nationale 60 ans après les indépendances. Le monde a changé, nous devons changer.
Le disant, je ne suis contre personne. Je ne suis en mission pour personne. Seul mon bonheur de supporter « mazo » me préoccupe. Je ne détiens pas la science infuse mais je pense en toute sincérité que c’est ce qui est mieux pour mon pays.
Voici des équipes africaines qui ont actuellement des techniciens locaux. Faisons comme elles.
– Algérie (Djamel Belmadi, nommé depuis le 1er août 2018)
– Burundi (Olivier Niyungeko, nommé depuis juillet 2016)
– Cameroun (Rigobert Song, nommé depuis le 18 février 2022)
– Cap Vert (Pedro Leitao, nommé depuis le 29 janvier 2020)
– Erythrée (Alemseged Efrem, nommé depuis 2015)
– Ethiopie (Wubetu Abate, nommé depuis le 28 septembre 2020)
– Ghana (Otto Addo, nommé depuis le 9 février 2022)
– Guinée Bissau (Baciro Candé, nommé depuis janvier 2017)
– Guinée Equatoriale (Rodolfo Bodipo, nommé depuis le 17 septembre 2020)
– Mali (Mohamed Magassouba, nommé depuis le 23 octobre 2019)
– Namibie (Bobby Samaria, intérimaire)
– Nigeria (Emmanuel Amunike, nommé depuis février 2022)
– Rwanda (Vincent Mashami, nommé depuis le 18 août 2018)
– Sénégal (Aliou Cissé, nommé depuis le 5 mars 2015)
– Sierra Léone : John Keister, nommé depuis le 10 août 2020)
– Soudan (Burthan Tiya, nommé depuis le 13 décembre 2021)
– Tunisie (Jalel Kadri, nommé depuis le 31 janvier 2022)
– Zimbabwe (Norman Mapeza, nommé depuis le 15 septembre 2021)
Loin de moi le chauvinisme mais la réalité implacable est qu’ailleurs dans le monde, on n’importe pas d’entraineurs. Chacun entraine l’équipe de son pays.
– Argentine (Lionel Scaloni, nommé depuis le 2 août 2018
– Brésil (Tite, depuis le 21 juin 2016)
– Uruguay (Diego Alonso, nommé depuis le 15 décembre 2021)
– Allemagne (Hans-Dieter Flick, nommé depuis le 1er août 2021)
– Angleterre (Gareth Southgate, nommé depuis le 27 septembre 2016)
– Espagne (Luis Enrique, nommé depuis le 19 novembre 2019)
– France (Didier Deschamps, nommé depuis le 8 juillet 2012)
– Italie (Roberto Mancini, nommé depuis le 14 mai 2018)
– Pays-Bas (Louis Van Gaal, nommé depuis le 22 juillet 2021)
– Portugal (Fernando Santos, nommé depuuis le 23 septembre 2014)
– Russie (Valeri Karpine, nommé depuis le 23 juillet 2021)
Pour finir, je vous donne la liste de tous ceux qui ont entrainé les Eléphants depuis l’indépendance afin que chacun se pose les bonnes questions. Et qu’on se mobilise tous pour dire : « non ça suffit ! »
1960 : Paul Gévaudan
CAN 1965 : Alphonse Bissouma Tapé
1966 : inconnu
1967-1968 : Paul Gévaudan
1968-1970 : Peter Schnittger
1970-1972 : Jean Tokpa
1972-1974 : Santa Rosa41
1974-1980 : Gérard Gabo
1982-1985 : Otto Pfister
1984 : David Duque Ferreira
1985-1986 : Pancho Gonzales
1987-1988 : Martial Yeo
1989 : Kaé Oulaï (intérim)
1989-1992 : Radivoje Ognjanović
1992-1993 : Martial Yeo
1993-1994 : Philippe Troussier
1994-1996 : Henryk Kasperczak
1996-1998 : Pierre Pleimelding
1998-2000 : Robert Nouzaret
2000 : Gbonké Tia (intérim)
2000-2001 : Patrick Parizon
2001-2002 : Lama Bamba
2002-2004 : Robert Nouzaret
2004-2007 : Henri Michel
2007-2008 : Ulrich Stielike
2008 : Gérard Gili (intérim)
2008-2010 : Vahid Halilhodžić
2010 : Georges Kouadio (intérim)
2010 : Sven-Göran Eriksson
2010-2012 : François Zahoui
2012-2014 : Sabri Lamouchi
2014-2015 : Hervé Renard
2015-2017 : Michel Dussuyer
mars 2017-novembre 2017 : Marc Wilmots
2018-2020 : Ibrahim Kamara
Depuis mars 2020 : Patrice Beaumelle
Merci de votre attention, merci de comprendre mon initiative et ma démarche. Je suis disponible pour toute critique constructive.
TRAORE MOUSSA
Citoyen engagé