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Une fois n’est pas coutume, parlons de notre, ô combien passionnant, métier. Et faisons mentir l’humoriste français, Guy Bedos (mort le 28 mai 2020), qui disait un jour: « Je croirais vraiment à la liberté de la presse quand un journaliste pourra écrire ce qu’il pense vraiment de son journal. Dans son journal. » Après plus d’une quinzaine d’années de pratique, pour ma part, il ne faut pas se le cacher, le journalisme est un rude gagne-pain. Une fois qu’on a été touché par le virus du métier au bout de six mois de stage enrichissant fait de contacts avec les plus hautes personnalités qu’on ne voyait qu’à la télé, on y renonce difficilement. Un métier qui n’est pas une sinécure. Les journalistes travaillent tous les jours de la semaine. Même le dimanche? Le dimanche, ils ne se reposent pas, comme le bon Dieu. Nos devanciers nous ont enseigné que la presse est une sorte de contre-pouvoir. Ils ont également insisté sur le fait que quand les gouvernements ou des dirigeants peu scrupuleux ont tendance à jouer avec le droit du travail, elle est là, sur son cheval blanc, prête à dénoncer. Mais les journaux ne parlent pas de la précarisation, du recours aux stagiaires, aux petites mains esclaves, aux salaires balancés avec un lance-pierre en leur propre sein. Surtout actuellement où la presse ivoirienne est sinistrée. Mévente des journaux, insuffisance de subventions pour la contrepartie de son rôle de quatrième pouvoir, difficulté de recouvrement de la manne due par les annonceurs publicitaires… Et j’en passe. Notre vie est ainsi faite que ceux qui ne réalisent pas encore la pénibilité de l’emploi aspirent à y entrer. J’ai un ancien collègue qui aimait à plaisanter en disant que le journaliste meurt généralement d’apoplexie ou d’arrêt cardiaque. A vrai dire, je ne crois pas qu’il y ait au monde un métier qui mette tant à contribution les facultés intellectuelles que celui du journaliste.

En tout temps et en tout lieu, celui ou celle qui exerce ce travail est en train de se triturer les méninges, de trouver des sujets dans les faits les plus banals, de chercher la petite bête chez les autres. Il y a une vérité de La Palice qui dit qu’on ne vient pas dans la presse pour s’enrichir. Quoique certains confrères – ils ne sont pas les plus nombreux- ont pignon sur rue, à Abidjan.

Le journaliste, pour moi, est surtout riche de son réseau de contacts. A quarante ans, le journaliste est sexagénaire. Il est aussi souvent chauve. Mais si, par extraordinaire, on se retire à temps de ce monde d’exception, de scepticisme, de tristesse et de défis, on peut s’adapter à plusieurs secteurs d’activités. Le journalisme mène à tous les métiers, a-t-on coutume de dire. Un tremplin pour certains, mais l’on reste journaliste à vie. Il y a que les journalistes sous les tropiques n’ont pas l’immense privilège accordé par Louis XIII en France au premier journaliste de son pays Théophraste Renaudot avec sa feuille hebdomadaire La Gazette. Un arrêt du Conseil du roi de France en novembre 1631 spécifiait que «quiconque porterait préjudice à Renaudot serait puni de six mille livres d’amende». C’était cela la vraie liberté, en somme l’âge d’or de la presse.

 

Par Bakayoko Youssouf

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