Jacques Mangoua, vice-président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI, d’Henri Konan Bédié) et président du Conseil régional du Gbêkê, a été condamné jeudi à cinq ans d’emprisonnement par le tribunal de Bouaké, au terme d’un procès sous tension. Des affrontements ont éclaté entre ses partisans et les forces de l’ordre.
Au terme du procès qui a duré quelques heures devant le tribunal de Bouaké, la juge Rosine Motchan a suivi les réquisitions du procureur Braman Koné, jeudi soir, condamnant Jacques Mangoua à cinq ans de prison ferme pour «détention de munitions d’armes de guerre sans autorisation administrative». Le vice-président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI, d’Henri Konan Bédié), a en outre été condamné à 5 ans de privation de ses droits civiques et 5 millions de francs CFA d’amende. Me Luc Adjé, ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats de Côte d’Ivoire, à la tête du collectif de défense de cet ancien puissant magnat du café-cacao, a indiqué son intention de faire appel du jugement dès ce vendredi.
La journée de jeudi avait été marquée par de vives tensions en amont de l’audience. Des affrontements ont notamment opposé les forces de l’ordre à des partisans de Jacques Mangoua venus le soutenir. Romaric Kouassi N’Guessan, sympathisant du PDCI, âgé de 32 ans, a été tué dans des circonstances non encore élucidées, à Djébonoua, une ville voisine de Bouaké. Plusieurs villes de la région du Gbêkê ont par ailleurs été paralysées par des mouvements de protestations. «Aucune analyse balistique n’a été faite pour conclure que les munitions – trouvées à son domicile, qui n’est pas habituellement habité, et signalées par Mangoua lui-même – , sont celles des balles qui ont servi lors des affrontements communautaires. Mieux, le procureur a écarté la piste d’une personne qui serait suspectée d’avoir déposé les sacs de munitions à la résidence de notre client », fustige Me Gohoré Emile Suy Bi, l’un des avocats du vice-président du PDCI.
C’est un «jugement inique et abscons», a dénoncé Privat Séri Bi N’Guessan, secrétaire exécutif par intérim du PDCI. Pour ce cadre du parti, la procédure a été « d’une rare rapidité défiant le bon sens ». Il juge en outre que, « par ce jugement, le PDCI et le peuple de Côte d’Ivoire se rendent bien compte que le pouvoir RHDP [Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), la formation d’Alassane Ouattara] vise, de façon anti-démocratique, la prise de la région du Gbêkê et de la zone du grand centre, en général, qu’il a perdue aux dernières élections municipales et régionales du 13 octobre 2019».
Placé sous mandat de dépôt lundi, Jacques Mangoua avait été interpellé vendredi 27 septembre. Une semaine auparavant, des sacs contenant « 991 munitions d’armes de guerre, 49 munitions de fusil calibre 12 et 40 machettes » avaient été découverts par un gardien dans la propriété qu’il possède à N’Guessankro, son village natal dans le département de Béoumi.
Informé, le chef du village – frère de Jacques Mangoua – a immédiatement prévenu ce dernier qui, à l’en croire, ne s’était pas rendu dans sa propriété depuis plusieurs mois. Jacques Mangoua aurait alors prévenu le chef de la gendarmerie locale et le préfet. Mais lorsque Mangoua se rend à Bouaké pour y être auditionné, il est placé en garde à vue, sur ordre du procureur. «Jacques Mangoua n’a pas été en mesure de justifier de la présence de ces armes» à son domicile. Lors de l’audience, le procureur a fait le lien entre la présence de ces armes au domicile de Mangoua et les affrontements intercommunautaires entre des membres des communautés baoulé et malinké qui ont éclaté à Béoumi en mai dernier. Seize personnes avaient été tuées dans ces violences.