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L’école a toujours incarné le bastion incontesté de la formation et de l’apprentissage, un lieu où l’excellence académique et le mérite sont célébrés comme des valeurs fondamentales. En Côte d’Ivoire, l’École Nationale d’Administration (ENA) se distingue comme l’un des établissements les plus prestigieux, sinon le plus prestigieux, pour la formation des cadres et hauts fonctionnaires de la nation. L’ancien Directeur Général de cette institution, le Professeur Dian Boni, disait d’ailleurs à son sujet que  »l’ENA est la plus grande de toutes les grandes écoles ». L’admission à l’ENA est le gage d’une reconnaissance des compétences et du niveau académique élevé requis pour occuper des postes de responsabilité.

Cependant, l’annonce récente de l’admissibilité de deux anciens secrétaires généraux de la Fédération Estudiantine et Scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI) à la première phase du concours d’entrée au cycle supérieur de cette illustre institution est inquiétante.

La FESCI est en effet tristement connue pour avoir déserté les amphithéâtres et bibliothèques au profit
de pratiques violentes, notamment l’usage d’armes blanches sur l’espace universitaire, la prise en otage des établissements scolaires pour régler des conflits internes ou des démêlés avec la justice, ou encore pour défier l’autorité de l’État.

La FESCI, faut-il le rappeler, ponctionnait 10 000 F CFA sur la bourse des étudiants au moyen d’intimidations et de violence. Cette pratique ignoble a persisté jusqu’à ce qu’une manifestation de ras-le-bol des étudiants y mette fin. De plus, la FESCI contraint les étudiants à assister à ses meetings sur l’espace universitaire et à son congrès en dehors de l’espace universitaire, allant jusqu’à verser de l’eau dans les chambres des étudiants en cité pour les obliger à y participer.

Comprenons-nous bien, la FESCI c’est : des chambres occupées illégalement par des non-étudiants ou sous-louées à des non-étudiants au mépris de l’administration et des étudiants
admis, c’est des commerces rackettés sur l’espace universitaire, c’est des universités et écoles fermées selon leur désidérata, c’est des étudiants brimés et terrorisés pour les plus chanceux et battus pour ceux qui refusent de subir l’injustice de cette organisation, c’est des étudiants hospitalisés à cause de leurs agissements, c’est des enseignants et l’administration constamment menacés, c’est des maquis installés au sein des cités universitaires avec une pollution sonore nocturne extrême, empêchant les étudiants studieux de préparer correctement leurs examens.

Ce ne sont là que des exemples parmi d’innombrables abus commis par cette organisation. Tout un ensemble d’agissements qui ternit l’image de nos universités et transforme nos
temples du savoir en champs de bataille et de violence.

Or, au demeurant, la FESCI n’est qu’une association et non un syndicat, encadrée de ce fait par la loi n°60-315 du 21 septembre 1960. Elle n’a donc pas le droit de paralyser l’espace universitaire au motif fallacieux d’une grève. En fait, le droit de grève ne fait pas partie de ses prérogatives, à plus forte raison la violence qui en découle.

À l’analyse de tous ces faits, nous nous interrogeons sérieusement sur la moralité de ces anciens responsables et de leur capacité à exercer de hautes fonctions au sein de l’administration avec probité et rigueur. Après avoir sacrifié l’avenir des enfants de pauvres, vont-ils encore venir narguer leurs victimes avec une fonction de cadre supérieur
qu’ils ne méritent même pas ?

Pour contrer une dérive imminente et faire barrage à la forfaiture et à l’imposture, lors des dernières élections locales, les cadres et candidats à Oumé se sont unis contre l’un d’entre eux, candidat dans cette localité. Ils ont agi ainsi pour se prémunir de confier les rênes de leur commune à quelqu’un qui a usé de violence contre leurs enfants admis dans les universités et grandes écoles.

Le 1er août 2024, le procureur de la République a fait état de l’arrestation de quatre membres de la FESCI, le 4 juin 2024, suite à des affrontements armés. Ces individus ont été placés sous mandat de dépôt le jour même, en raison de la gravité des faits, et leur procès a été reporté au 16 octobre 2024. Cet incident n’est qu’un exemple parmi des milliers de cas similaires, illustrant les pratiques déplorables de la FESCI.

En dépit de la procédure judiciaire en cours, la FESCI a réagi en paralysant l’Université Félix Houphouët-Boigny comme pour défier ou contraindre la justice à accéder à ses demandes hors de tout cadre règlementaire et au mépris de tout cadre juridique, en s’en prenant aux étudiants ainsi qu’aux forces de police qui tentaient de rétablir l’ordre sur l’espace universitaire.

C’est pourquoi nous espérons, mieux, nous souhaitons profondément que, dans le cadre de ce concours, ils soient évalués sur la base de leurs compétences intrinsèques et des connaissances acquises à l’université afin que les études rigoureuses et assidues soient les références de la République. Ceci est un cri de cœur et une tentative de combattre l’injustice sociale et la médiocratie.  »La médiocratie, désigne l’ordre médiocre érigé en modèle », selon le philosophe Alain Deneault dans son livre du même titre.

Il en va de l’avenir de notre pays. Il en va aussi de l’avenir de nos enfants, qui méritent un système éducatif fondé sur le mérite, l’équité et la rigueur. En définitive, la méritocratie doit prévaloir, toujours, sur la médiocratie.

Le Collectif des Libres Penseurs pour la République

(un groupe d’étudiants de l’Université FHB)

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