PARTAGER

Le pays est le principal fournisseur africain de caoutchouc naturel. L’hévéa, souvent perçu comme un déchet dans la production de caoutchouc naturel, connaît un nouvel élan. Abidjan mise sur les biocarburants pour améliorer ses recettes.

En Côte d’Ivoire, le groupe pétrogazier italien ENI a officiellement lancé le 18 juillet 2024 la campagne 2024 de collecte de graines d’hévéa dans le pays, avec pour objectif de se procurer 50 000 tonnes de graines.
La compagnie transformera localement ce stock en huile végétale, qui sera par la suite acheminée vers des bioraffineries pour la production de biocarburants et de biomasse pour la production d’énergie.
Cette initiative marque un tournant pour la filière ivoirienne d’hévéa, dont le principal produit d’exportation et d’exploitation était jusque-là le caoutchouc naturel. L’utilisation des graines d’hévéa dans la production de biocarburants ouvre des perspectives économiques nouvelles pour les acteurs de la filière.
Selon Statista, le marché mondial des biocarburants, évalué à près de 120 milliards $ en 2023, devrait croître de 46 % d’ici 2030, atteignant plus de 175 milliards $.
Plus optimistes, les projections formulées par la plateforme d’étude de marché Extrapolate indiquent que la taille de ce marché devrait atteindre 235 milliards $ d’ici 2031, en raison du besoin croissant de solutions énergétiques durables et de l’importance accordée à la réduction des émissions de carbone.
Ces prévisions représentent une opportunité pour les fournisseurs de graines d’hévéas qui pourraient voir la demande augmenter.
Par ailleurs, la nation éburnéenne aspire également à développer une industrie locale de biocarburants pour une utilisation à grande échelle.
Sidiki Cissé, directeur général de l’Agence nationale d’appui au développement rural (Anader) a révélé le 2 octobre 2024 que la Société ivoirienne de raffinage (SIR) a réussi à produire 1 500 litres de biodiesel à base de graines d’hévéa, qui ont été testés avec succès, confirmant la viabilité du produit.
Cette expérimentation est le fruit d’un projet lancé en 2022 par un consortium composé de l’Anader, la SIR, le constructeur automobile suédois Scania et la multinationale française TotalEnergies.
« J’appelle de tous mes vœux l’adoption d’un cadre législatif et réglementaire régissant la filière biocarburant en Côte d’Ivoire afin d’inciter les investisseurs à s’intéresser à ce secteur hautement stratégique pour la Côte d’Ivoire en termes de souveraineté énergétique et de valorisation de la biomasse agricole par la création de ressources additionnelles pour les exploitants de la filière hévéa », a déclaré M. Cissé dans des propos relayés par les médias locaux.

Potentiel de la Côte d’Ivoire pour l’approvisionnement en graines d’hévéa

Premier producteur africain de caoutchouc naturel et troisième producteur mondial derrière la Thaïlande et l’Indonésie, la Côte d’Ivoire dispose d’un important potentiel pour devenir un acteur clé dans la fourniture de graines d’hévéa pour l’industrie des biocarburants.
D’après la Fédération des organisations professionnelles agricoles des producteurs de la filière hévéa (FPH-CI), la Côte d’Ivoire exploitait environ 700 000 hectares de plantations avec pour ambition de faire passer la superficie plantée à près de 800 000 hectares, d’ici à 2027.
S’exprimant sur la capacité de la filière ivoirienne à fournir la graine d’hévéa en juillet 2024, Michel Koblavi-Dibi, président de la FPH-CI, a révélé que l’appareil productif était en mesure de collecter jusqu’à 93 000 tonnes de graines en 2024.

Un modèle pour les producteurs de caoutchouc

En dehors de la Côte d’Ivoire, la superficie agricole consacrée à l’hévéa en Afrique de l’Ouest était évaluée à plus de 642 000 hectares d’après les données de la FAO. Le Nigéria, le Ghana et le Liberia se distinguent dans la production, concentrant respectivement pour 56, 21 et 20 % de la surface d’exploitation annoncée.
En s’inspirant de la Côte d’Ivoire, ces pays pourraient également diversifier leur économie et réduire leur vulnérabilité aux fluctuations des marchés mondiaux.
Il s’agit en outre d’une opportunité qui pourrait contribuer à augmenter les revenus des petits exploitants agricoles travaillant dans la filière hévéa, dont les revenus dépendent exclusivement de la production de caoutchouc naturel.
La fourniture de graines d’hévéa pour l’industrie des biocarburants représente une option particulièrement intéressante pour ces producteurs, surtout dans des pays comme le Liberia, qui interdisent l’exportation de caoutchouc naturel afin de favoriser le développement de leur industrie locale de transformation de caoutchouc.

Avec Agences

PARTAGER